Ce mot ouvre en moi un frisson. Étrange mélange intérieur d’interdit, de douceur, d’envie et de musique.
Le voyage comme un appel. Oui un appel à un pas de côté, un regard neuf, à ouvrir une part d’inconnu, cueillir une incertitude. Sans forcément ni train, ni avion. C’est un instant ouvert. J’y entre. Je l’explore, je le reçois. Je pars, je bouge. Je quitte, je reviens. Permanent déséquilibre du temps.
Le voyage comme une voix, échappée en musique. Les notes résonnent en mon corps, ouvrent des nuances, des rencontres, des émotions, soulèvent vagues, remous, douceur, bien-être et bien plus encore. C’est un paysage sonore où les sons prennent couleurs et m’entraînent en des méandres inédits. Émotions encore pour dire l’indicible, le non-dit. Une voix, que dis-je, des voix. La tienne, toi que je rencontre, que je découvre, la leur, eux qui croisent mon chemin, mes explorations, la vôtre, amis, familles, proches que j’accueille, sans lassitude ni habitudes. Sonorité incessante de l’espace.
Le voyage comme une voie. Une intuition de ne jamais rester sur l’acquis, l’assis, le bétonné. Toujours partir un peu plus loin pour bâtir. Poser le pas suivant comme un départ. Ni fuite, ni désordre, ni angoisse, juste un pas de côté décalé, permissif, inventif. Une voie ? Mais il n’y en a pas qu’une… et heureusement ! Car chaque voie est une et unique à l’heure où on l’explore, la déflore, la goûte et l’écoute. Humble discrétion de l’inédit.
Quand on n’y prend garde, le voyage peut être agression. De voyageur on devient voyeur, dans le geste, la parole ou le regard. Voyager, se nourrir, engranger, cueillir, rencontrer peut se transformer en voracité, en rapt, en viol, en prise d’otage du lieu, de l’instant, de celui qu’alors je ne respecte plus. Je ne suis plus veilleur du meilleur et de l’inattendu, encore moins d’un élan. Je vole, j’abîme comme un voyageur rageur et ravageur. Férocité de l’égoïsme.
Il n’y a d’âge pour le voyage. Il prend la figure du nôtre, reflète nos impatiences, comme nos timidités. Tente de répondre à nos attentes, d’apaiser nos urgences. Faut-il beaucoup de kilomètres pour voir ce qui vit là-bas, loin, derrière les monts et les mers ? Ou plus simplement, aller au-devant de ce qui vient sans prévision ? J’ai voyagé je crois, de milles manières, de milles couleurs, de milles instants, sans toujours le savoir. Le temps m’a appris. Nous sommes en voyage, toujours, aujourd’hui et rien ne peut ternir la richesse de ce présent.
Voyage
Répondre