Une jolie façon de s’envoyer en l’air…

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Le matin est glacé. Il fait nuit noire en cette fin de septembre, 6 heures du matin et je tremble de froid dans ma polaire. Les vitraux de l’église de Saint Clair-sur-Epte luisent dans la nuit. Quelques ombres tournent sur la même place que moi. Je ne suis pas seule à attendre. Deux Land rover se garent près de nous. Et nous emmènent tous, direction les montgolfières. Le matin est blafard, il se lève paresseusement. La brume s’étire sur les prairies. Les lueurs de l’aube dressent les arbres en noires silhouettes. Les verts, bleus des prairies croisent les gris des moiteurs qui s’élèvent de la terre. Corot réinventé. Une voiture passe au loin. Ses phares crachent furtivement leur lumière.

Et nous arrivons au terrain de décollage. En fait de terrain, c’est une prairie dont l’herbe n’a pas été fauchée depuis bien longtemps et nous sommes trempés en quelques pas. Au travail, ça réchauffe. Nous sortons le panier qui va nous accueillir pour le vol. Puis, la toile de la montgolfière se dévide au fil de la voiture qui avance, s’affalant paresseusement sur le sol. Un énorme serpent jaune et bleu. Il faut étirer cette immense toile, tenter de lui donner son ampleur. Et puis, plus rien. Le pilote disparait dans la campagne. Chacun se demande ce qui se passe. Et j’ai froid. Je marche de long en large. J’ai faim!!! Le temps se traîne… Mais que se passe-t-il?

9h…10h…

En fait, la brume est trop présente et si elle ne se lève pas, le départ ne pourra pas se faire. Croissants, pains au chocolat et café font un peu passer le temps. On va sans doute partir. Certains sont déjà repartis plusieurs fois bredouilles pour cause d’intempéries. Alors, quand le départ est donné, je mesure ma chance de partir normalement du premier coup.

Le pilote met alors le moteur en route, il crache des flammes longilignes. Le ciel s’éclaire. Puis les ventilateurs se mettent à souffler pour gonfler les toiles. On tire la toile pour laisser l’air s’y engouffrer. Et un étrange ballet commence. Une mer de couleur danse sous nos yeux. Peu à peu, une bulle se gonfle, sans cesse en mouvement, en flux et reflux de souffle, comme en hésitation. Et puis, nous sommes dépassés, dominés par une immense caverne bleue et jaune. Le pilote s’y engage… minuscule silhouette dominée de voiles de couleur.

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Puis la toile tendue relève le panier. C’est là qu’il parait bien fragile. Nous y grimpons à 7. Foulard sur les cheveux pour se protéger de la chaleur du moteur. Un grand crachat de feu et nous nous élevons à une vitesse surprenante. En quelques instants, les deux autres montgolfières restées au sol nous apparaissent minuscules. Puis, c’est un silence ouaté, souffle retenu, silence partagé, ébloui. Brisé par instants par une longue flamme, crachée, rauque. Une sorte de flottement, être en plein ciel prend tout son sens. En être une part au gré d’un souffle léger. Sans médiations aucunes que ce panier qui nous porte.

De là où nous sommes les couleurs de la terre prennent une douceur ombrée. On s’attendrait presque à voir Peter pan et Wendy nous inviter à nous envoler. Magie intemporelle ! Les repères n’existent plus. L’instant est d’une douceur rassurante. Une envolée sans heurts, je vogue, flotte, nage, … je rêve!

L’atterrissage laisse pantois les novices que nous sommes. A coup de flammes bien réparties, le pilote nous pose dans un champ sans à-coups! Puis nous replions tout. Il nous arrive de peiner à plier serviettes ou draps. Alors imaginez une montgolfière!!!

Non, n’imaginez pas, cela pourrait vous ternir l’envie d’y monter un jour et ce serait trop dommage. C’est fabuleux et magnifique!