Portrait 4

Dans une fête récemment, j’ai croisé un couple dont la discordance m’a touché. Lui, bel homme aux cheveux noirs dans la représentation étudiée et elle, jolie et fine blonde un peu perdue le regard triste… Je lui laisse la parole.

J’avance doucement dans le grand parc éclairé. Timidement. Je ne suis pas une habituée de ces fêtes immenses où le champagne coule à flot, les regards se perdent en musique. Les codes ne sont pas les miens.
Je suis là pour toi. Pour te retrouver, te suivre, essayer de te garder. Tu as fondu devant mon innocente blondeur, j’ai été rejointe par ta vigueur contrôlée. Cette attention aigue, presqu’aux aguets de tout et de tous. Ce regard aiguisé, jamais au repos. J’ai été électrisée, bousculée, esclave. Et j’ai mis mes pas dans les tiens.
Je te vois sur le perron, j’assouplis mon pas inconsciemment, je chaloupe, je danse. Ton regard m’accroche, tu souris mais je sens comme une absence, une attente aussi. Tu as mis entre nous un imperceptible filtre. Que veux-tu de moi ce soir ?
La soirée a coulé. Impavide. Aux couleurs commandées. J’ai senti ta détente progressive. A l’inverse de mon plaisir. Je me perds dans ces fêtes sous commande de celui qui paie. Aux bulles prévisibles et jeux de dupes. Même les rires semblent prévus. Et dans celle-ci comme dans les autres, je m’y suis noyée. Mais j’ai tenté de le masquer le mieux possible, apportant à tes côtés ma contribution la plus attentive. Jouée.
J’ai dû y réussir mieux que je ne le pensais. Car ton salut de départ à nos hôtes a claqué comme une victoire. J’étais donc un valable faire-valoir ? Dans l’allée flamboyante, au retour, nos pas n’avaient pas le même écho. Peu de mots en commun. Si peu. Et la franchise de ton regard comme évaporée.
Où es-tu donc ? Avons-nous été ensemble ce soir ?

Voeux

Et il y a toujours cette incertitude du matin
de ce que sera le jour, sa couleur, sa musique…
Quel souffle emportera le feuillage de nos peurs,
les entailles de nos doutes ?

Rien n’est écrit sur l’écorce creusée
juste la trace de la nuit sur les lèvres de son bois
juste le geste effréné des branches vers le jour
juste l’insolente mélopée des feuilles sous la brise.

Sous le couvert de l’aube, la danse des ombres inconnues
ouvrira nos voix, dessinera nos pas
comme le sifflement des nuages emportés par la sève.

Et dans sa course, la rivière portera une douceur
à la joie de nos rires, à nos mains enlacées,
à la lumière ajourée de nos silences,
aux accents acidulés, tenaces, cocasses aussi, de nos amitiés,
à la méticuleuse audace de nos tendresses,
à l’élan inestimable, improbable, imprévu de nos amours
encore et encore malgré tout!

Belle route au long de 2020….