Obstinée, elle remonte le courant.
Le froid fouette ses jambes.
Lourds d’eau, ses pieds bousculent les pierres,
Hésitent en aveugles sous les dérobades du sol.
Fragile équilibre de l’incessant déséquilibre.
Le torrent tourne, bouillonne. Sa route se cache à son regard.
Elle continue sa marche. Elle ne sait pas trop jusqu’où.
Elle avance. Seule.
Guettant le paysage à venir derrière la courbe.
Ce matin, le soleil ouvre la marche.
Il annonce le jour avec fanfare.
L’air danse lui aussi. Insouciant.
Une large pierre polie de vent, d’eau et de soleil s’offre. Ingénue.
Elle y grimpe, se pause, s’accueille.
Guettant le chant de l’air, la musique des odeurs, les couleurs bavardes.
Tout la chatouille et la pénètre, comme une alliance savoureuse.
Ce matin, la brume noie le torrent.
Le soleil est vaincu. Les arbres éteints.
Son pas devient son seul horizon. Ne pas se perdre loin de lui.
Ne pas chuter, ne pas trembler. Ses pieds butent, maladroits
Même les bruits ne sont plus les mêmes.
Chambre d’échos des cahots de sa marche.
Paresseux, le brouillard s’étire et s’allège
De la brume opaque naissent des ombres.
Des ombres, des corps, en marche. Comme elle.
Elle n’est donc pas seule à brusquer le torrent.
A chercher la source qui nourrit le courant.